Diagnostic préimplantatoire: la consultation c'est maintenant

Sous l'angle technique, le diagnostic préimplantatoire c'est une méthode pouvant être utilisée lors de la fertilisation in vitro, qui permet d'analyser quelques caractéristiques génétiques d'un embryon très précoce, avant de l'implanter...ou non.

Sous l'angle humain, le diagnostic préimplantatoire est une méthode qui permet à des couples frappés lourdement par une maladie génétique grave, à des personnes qui ont parfois déjà perdu un enfant, parfois plusieurs, de donner la vie malgré cela sans devoir à nouveau traverser les mêmes épreuves.

En Suisse, actuellement, ce geste est interdit. Du coup, notre loi actuelle crée une situation où les couples frappés par une maladie génétique grave et qui souhaite avoir un enfant malgré cela doivent passer par une "grossesse à l'essai". Concevoir un enfant, attendre pour pratiquer un diagnostic prénatal -qui est autorisé- tout en sachant que si la maladie est présente ils avorteront à ce moment et recommenceront. C'est difficile d'imaginer à quel point cette démarche peut être tragique. Aux yeux de ces couples, donc, et des médecins qui les suivent dans leur parcours, il est évident que le diagnostic préimplantatoire, loin d'être un problème, est en fait une solution. Et pourquoi pas? Clairement, il est plus responsable d'y avoir recours que de prévoir en quelque sorte d'emblée une interruption de grossesse.

Cet aspect de la question est longtemps resté au second plan derrière le difficile enjeu du statut de l'embryon, que le DPI soulève bien sûr également. Mais un projet de loi est actuellement en consultation dans notre pays pour une autorisation encadrée du DPI. Il était temps, diront certains. D'autres pourraient y voir des problèmes, mais il semble que le projet présenté ait pour le moment récolté peu d'opposition. Peut-être n'est-ce pas surprenant. Légaliser le DPI, en Suisse, aujourd'hui, c'est sage. La loi actuelle, pourtant écrite sur de très bonnes intentions, ne protège en fait personne. Elle ne protège pas les parents, qui se trouvent face à des choix encore plus tragiques. Ce fardeau, la loi actuelle l'imposait au parents au nom de deux autres considérations, qu'elle ne remplit en fait pas non plus.

D'abord, elle ne protège pas les embryons. Ou alors, contre quoi? Même en faisant abstraction du fait que nos société n'ont aucun consensus sur le statut de l'embryon et le degré de protection morale qu'on lui doit, la réponse n'est pas simple. Disons que, pour cette discussion, on accepte que les embryons doivent être protégés comme vous et moi. Contre quoi, exactement, l'interdiction du DPI les protège-t-elle? Contre le fait d'être généré? Pour dire les choses très concrètement, contre une existence de cinq jours à l'état de quelques cellules, et dont l'alternative est de ne jamais avoir existé? Si vous pensez que cette protection-là est suffisamment importante pour imposer un fardeau aux parents, dites-nous pourquoi dans les commentaires. Je suis intéressée. Mais ce qui frappe, là, c'est surtout à quel point nos schémas peuvent être trompeurs. Quand on pense à un embryon, c'est parfois comme si on pensait à un tout petit-très très petit- bébé, qui allait devenir un jour un enfant puis un adulte. On pense au début d'une histoire, à l'alternative de naître. Mais dans la réalité un grand nombre d'embryons ne naîtront jamais même lorsqu'ils auront été conçus 'naturellement'. Et si l'on estimait important de leur épargner ce 'sort', on devrait alors songer à arrêter de faire des enfants...

Une autre raison de la loi actuelle est le souci que choisir un embryon plutôt qu'un autre pourrait exprimer que l'autre ne méritait pas de vivre. Cela pourrait aussi nous décourager de faire des efforts pour rendre nos infrastructures plus faciles pour les personnes handicapées, par exemple. C'est une des raisons pour lesquelles les militants pour les droits des handicapés se sont souvent exprimés contre le DPI, même si un certain nombre ne semble pas s'opposer au projet de loi en consultation. Alors oui, protéger les droits des personnes vivant avec un handicap, et défendre leur accès aux moyens de mener une vie digne et aussi libre que possible, c'est crucial. Mais ces personnes, justement, ne sont pas des embryons; interdire le DPI ne les protège pas. Serions-nous vraiment plus ou moins capables de respecter nos semblables et de leur faire une place adaptée, simplement parce que quelques couples auront réalisé une analyse génétique sur leur embryon? Il est de toute manière important défendre ces valeurs. Se dire que maintenir l'interdiction du DPI les protègera, cela ressemble à de la bonne conscience artificielle. Ces valeurs sont importantes. Beaucoup trop pour qu'on se rassure ainsi d'une mesure qui, en fait, ne les protège pas.

Alors oui, autoriser le DPI suppose un certain nombre de précautions, mais parmi les projets raisonnablement imaginables, celui qu'on nous propose est plutôt très prudent. Si vous avez le temps de le lire, dites-moi ce que vous en pensez...

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