Dépistage de la trisomie 21

Vous avez vu le nouveau lien à droite sous 'Une question médicale'? C'est le nouveau site Planete Santé. Allez le voir. Il va encore s'étoffer au fil du temps mais c'est déjà une très belle source d'informations sur toute une série de questions de santé, y compris des pages 'Que faire si...' vraiment très bien faites.

Et au passage, vous serez peut-être intéressé par un sujet d'éthique sur lequel on m'a posé récemment quelques questions dans la presse. Le contexte, c'est une tension autour du dépistage de la trisomie 21. La naissance d'un enfant atteint est un bouleversement important pour la famille concernée. Du coup, le dépistage est systématiquement offert et largement employé. Il devrait même être facilité prochainement par de nouvelles techniques. En même temps, même si la trisomie 21 est une maladie sérieuse, elle n’empêche pas pour autant les personnes de bien vivre. Pas question donc de rendre le dépistage obligatoire, c'est un choix laissé aux parents. Un choix difficile. Qui confronte de plus en plus de couples avec l'augmentation de l'âge maternel: c'est cela que montre l'image qui ouvre ce billet (attention, ce n'est pas des pourcents mais des pour mille). Ce choix soulève des inquiétudes. J'ai aussi conscience que c'est un sujet qui peut soulever beaucoup d'émotions, à juste titre. Si vous en pensez quelque chose, dites-le nous dans les commentaires...

Voici ce que j'avais dit. Comme d'habitude, le texte et le lien:

Quel est le principal enjeu éthique du dépistage de la trisomie 21?

Le dépistage doit être décidé librement par les parents et non interdit ou imposé. La naissance d’un enfant atteint de trisomie 21 implique un investissement personnel supplémentaire. Si leur choix est limité parce que le soutien disponible au cas où ils poursuivraient la grossesse est insuffisant, c’est un problème. On ne peut pas dire aux parents que faire le dépistage de la trisomie 21 est leur choix, et, d’autre part, leur imposer de se débrouiller seuls.

Le choix de l’avortement quasi systématique est-il une forme d’eugénisme?

Le problème n’est pas de confier un choix aux parents, mais de le leur ôter. Lorsque l’on parle d’eugénisme, il y a deux composantes: le but d’«améliorer l’espèce» par une sélection positive ou négative, et l’intrusion dans les choix reproductifs des couples. Donner un choix de plus aux parents est le contraire de l’eugénisme. Mais l’important est de protéger ce choix contre des pressions. Car si celles-ci augmentent, on diminue les possibilités des parents et on risque de déterminer à leur place leur décision. Nous vivons à une époque où l’appui est souvent jugé insuffisant par les familles atteintes, où l’on diminue les moyens de l’assurance invalidité. Si des parents peuvent se baser sur leur propre choix, non contraints, pourquoi ne pas alors leur faire confiance?

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Légaliser l'euthanasie?

En Suisse, l'assistance au suicide est légale. Du coup, la question de légaliser ou non l'euthanasie n'est pas tout à fait la même qu'ailleurs. J'ai donné cette semaine une conférence sur la question, et on l'a enregistrée. Si elle vous intéresse, elle se trouve ici.


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Médicaments génériques


Les yeux du monde sont rivés sur la Cour Suprême indienne...

Bon, je triche un peu. En fait ils ne le sont pas, mais ils devraient l'être. Car le 28 février prochain commenceront les auditions pour un cas qui pourrait changer la face de la médecine internationale. Et pas en bien. Ce cas devrait tout particulièrement nous occuper en Suisse car le plaignant est...Novartis.

La plainte? Un bureau indien des brevets a refusé un brevet sur le Glivec (un médicament anticancéreux) en appliquant pour cela une clause de la loi indienne qui "sert à empêcher que les entreprises pharmaceutiques obtiennent des brevets sur des améliorations évidentes de molécules connues ou sur de nouveaux usages médicaux de substances connues". Qu'à cela ne tienne, Novartis conteste la décision. Banal.

Sauf que ... ils demandent aussi que cette loi soit changée. Et si c'était le cas, alors cela vaudrait aussi pour toute une série d'autres médicaments. Il (re)deviendrait alors possible d'obtenir en Inde des brevets pour de nouvelles indications du même médicament, ou pour des changements mineurs sur des substances déjà connues. En anglais on appelle ça ever-greening ou 'reverdir' un brevet. C'est la prolongation du monopole, et avec lui du prix élevé, de substances bien au delà de la protection initiale garantie par le système des brevets à l'innovation.

Parmi les traitements qui pourraient être touchés si Novartis avait gain de cause, les traitements de la tuberculose et du HIV. Car l'Inde non seulement produit mais exporte massivement des médicaments génériques. C'est le fournisseur le plus important des médicaments qui sont souvent les seuls accessibles aux malades des pays pauvres. MSF rapporte que 80% des médicaments employés dans leurs programmes HIV proviennent d'Inde. Fermer ce robinet, non ce n'est pas du tout banal.

Sur la toile, donc, les appels se multiplient pour demander à Novartis de retirer son action en justice. Quel formidable exemple si c'était le cas. Mais au vu des sommes en jeu, on peut douter de l'efficacité de ces appels. Qu'à cela ne tienne: signez la pétition, diffusez l'information. Faites ce que vous pouvez là où vous êtes.

Plus plausible, la Cour Suprême indienne pourrait tenir bon. La disposition légale qui est remise en question ici est apparemment parfaitement compatible avec les dispositions internationales (les plus motivés trouveront un rapport de l'OMS ici). Je ne suis pas spécialiste du droit des brevets, donc j'attends qu'on me corrige dans les commentaires si je me trompe là-dessus.

Mais surtout: ne serait-il pas temps de repenser le système qui donne ici à un acteur si puissant des raisons si pesantes d'agir contre l'intérêt des plus démunis? Ça, on en reparlera une autre fois...

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Encore la Syrie

Je vous avais parlé il y a quelques semaines des attaques contre les médecins de Syrie. Maintenant, ce sont les malades qui sont visés. Directement. Bertrand Kiefer décrit cela dans la Revue Médicale Suisse. Un extrait et le lien. Mais attention, lecture difficile à soutenir:

"A la question : pourquoi cet acharnement des forces de sécurité à empêcher tout acte médical ? On peut répondre : parce que la médecine est au point de contact le plus étroit entre l’humain et le pouvoir. C’est dans l’acte de soigner, dans les rites et les valeurs de la médecine, dans la prise en charge de la personne souffrante que se construit l’humain. C’est donc en faisant disparaître cette démarche, en la moquant et en la retournant par la torture que l’on déconstruit le mieux la dignité, qu’on réussit le tour de passe-passe consistant à faire croire qu’une personne peut n’être qu’une masse de chair haïssable.

Torturer un bien portant est une immense violence. Mais torturer les mourants, maltraiter les malades, tuer ou détourner des médecins sert encore mieux les objectifs de la terreur. La tabula rasa des valeurs est achevée. Le pouvoir n’a plus d’autre fondation que lui-même."

Difficile à soutenir, oui. Alors je suis sans doute naïve et quelqu'un va certainement me corriger ici, mais: au nom de quoi, déjà, préfère-t-on laisser faire cela?

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Maladies orphelines


Les maladies orphelines, eh ben ce sont des maladies...comme les autres. Elles limitent la vie, dressent des obstacles, affectent la vie des malades profondément, et négativement. Seulement voilà, ce ne sont pas tout à fait des maladies come les autres non plus car si nous considérons que nous avons droit à des soins, à de l'aide pour guérir, lorsque la maladie nous frappe, ce droit est plus difficile à réaliser dans le cas des maladies orphelines. Plus difficile à réaliser de la même manière. C'est un défi que nous devons relever, car il n'y a aucune raison d'accepter de traiter moins bien ces malades-là que les autres. En plus, une partie des difficultés auxquelles ils font face sont dû aux mécanismes qui nous servent si bien pour les maladies fréquentes mais tendent - parfois - des pièges sur leur route à eux.

On m'a posé ces questions récemment dans une émission qui expliquait aussi toutes sortes de choses intéressantes sur les maladies orphelines. Intéressés? C'est ici...

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Nous mourrons tous...mais comment?


Autour de la fin de vie, une évidence et énormément de questions. L'évidence, c'est bien sûr que nous mourrons tous. Les questions sont donc du genre à soulever beaucoup d'émotions, et chaque fois qu'il s'agit de discuter de comment accompagner au mieux ceux qui partent, eh bien cela se voit. Mais en France, il semble qu'un nouveau chapitre des discussions autour de la fin de vie arrive bientôt. En fait cela pourrait être une étape cruciale: car il y aura bientôt des fait disponibles sur la manière dont se passe la fin de vie en France, maintenant et sous les lois actuelles. Remarquable interview de Régis Aubry  ici. Cela ne dure que cinq minutes, mais dans ce temps très bref que de chemin parcouru. D'abord, une étude est en cours sur la réalité de la fin de vie en France. Ensuite, elle explore sans tabous, c'est-à-dire qu'elle examine aussi la pratique de l'euthanasie active alors même que celle-ci est illégale. D'autres pays considèrent depuis longtemps de telles études comme fondamentales pour permettre un débat...réaliste. Mais là, la France était jusqu'à présent plus ou moins restée à l'écart. Sans vouloir commenter spécifiquement le débat français, ne pas avoir de données sur les faits n'est en général pas bon pour la qualité d'une discussion sur un enjeu controversé. Avec des représentations différentes de la réalité, on tend au dialogue de sourds. Avec de meilleures informations, on n'est bien sûr toujours pas tous d'accord sur certaines questions de fin de vie, mais au moins la discussion peut avoir lieu sur des bases saines.

Ces études, leurs résultats sont parfois surprenants. Pour prendre l'exemple de l'euthanasie active, lorsque l'on se penche sur les observations, on constate qu'il n'est pas vrai que l'on pratique l'euthanasie active uniquement là où elle est autorisée. Il n'est pas clair non plus que l'interdire en évite les dérives. Et le développement des soins palliatifs, si important pour permettre une fin de vie digne aux malades, n'est pas une alternative à la réflexion sur l'assistance au suicide ou l'euthanasie. Il peut avoir lieu -et c'est heureux- quel que soit le statut légal du choix de mourir.

Se pencher sur la réalité du mourir, c'est aussi se rappeler à quel point des positions 'pour ou contre' quoi que ce soit peuvent être simplistes. Un point compris par l'Observatoire National de la fin de vie en France, dont le rapport (disponible ici) ne prend pas de position partisane. Cela pourrait véritablement être une nouvelle étape de la discussion qui s'annonce. A en croire les commentaires sur un reportage qui s'est récemment penché sur un cas particulier, les tentatives d'avoir un débat mesuré sont encore inégales. Mais maintenant voilà: les résultats de la première étude systématique française sur la fin de vie sont annoncés pour le mois prochain. Peut-être cela ne changera-t-il pas tout, mais ce sera certainement difficile à ignorer. Une intéressante discussion en perspective.

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